Les proses noires du chat (5)
Chute avant midi.
Légèreté
du mouvement qui choit, froid du carrelage qui heurte sa tête.
Elle n’est pas folle, regardez, elle ne suffoque
même pas,
Mais l’anarchie réglementaire reprend aussitôt ses
droits.
Elle va se noyer si je la laisse.
Je suis le chat noir comme ses désirs qui tirent
son âme au fond d’elle,
bleue de froid, d’effroi.
Où est l’âme elle-même qui s’est trahie?
obsession
de l’erreur étouffante, oppressante, annihilante.
Où est l’âme dans ce fatras d’incertitudes
clandestines et réfugiées au plus profond,
très profond
d’elle qui ne sais plus où aller, comment faire,
que dire et que penser pour aimer.
où sont
les mots ?
Elle ne sait plus dire, ni écrire, ni penser, ni aimer.
mains bien à plat sur la table,
et la montre,
et le temps,
savez-vous de quoi elle parle ?
Tout ne peut pas être
mesuré,
tout ne peut pas être
construit,
on peut vivre dans des
ruines, dans du carton pâte, sur un terrain vague.
quoi que vous pensiez
Elle est très belle, elle aussi,
très pure elle aussi,
il y a dans sa jouissance quelque chose d’immaculé
qu’au moins elle possède
que vous ne voyez pas,
enfermés que vous êtes dans des codes qui ne sont
pas les vôtres.
aux tempes et aux poignets de fer blanc.
l’extatique pouvoir de la déraison sombre et
mielleuse est là.
Doucement, entendez-vous,
tout est artificiel,
il faut beaucoup penser pour ne plus penser,
pour ne plus dire,
pour sentir,
pour exprimer seulement
la solitude du néant obscur du bric-à-brac de la
pensée nubile et fraîche
qui tord ses mains dans ses cheveux d’or en un
poison.
brouillard dense et insondable silence,
silence bruyant et assourdissant du chat.
Où est-elle dans tout ça?
L’essoufflement arrive,
inspiration,
expiration,
suffocation,
la fin.
Les larmes qui lui dérobent son essence,
rattrapez son âme qui coule sur le sol…
Dîtes lui
qu’elle n’est plus, tout à coup,
Qu’elle s’est dématérialisée, désubstantifiée.
Le chat est tombé, je suis son seul monde, son
unique moi qui tombe et s’effrite.