Les proses noires du chat (6)
Je suis le chat, en bas de
l’échelle, qui la regarde, monter vers le ciel.
Si elle retombe, je me romps,
Si elle s’envole, je m’efface.
Quand elle lève la tête,
l’échelle vacille,
Et elle enfonce ses dents dans
les barreaux.
Quand elle baisse les yeux, je
ronronne au pied du mur,
Et elle ravale le sang au fond
de sa bouche.
Et comme une pelote de laine
se défile jusqu’à moi.
Tendant les griffes, je m’en
amuse, j’en tire le fil jusqu’à son cri.
Tendues de son passé,
Les outres pleines qui se
crèvent une à une.
Dressés depuis le sol,
Les lambeaux blancs des
évidences qui l’abandonnent
Et je m’étends à terre.
Et le soleil m’échauffe les
flancs.
Elle n’y pense pas
Elle ne comprend pas,
Pourtant je sais
Qu’il n’y a pas de sommet à
son échelle.
Que des écrans dissimulent ce
qui lui reste à franchir
Et qu’elle est condamnée à ne
jamais s’arrêter.
Moi je sais que je n’y serai
pas.
Elle n’est pas sûre de pouvoir
aimer ce qu’on lui a promis
Elle n’ignore pas qu’elle n’a
pas réellement tout choisi
Souvent la crainte la tord
d’avoir trahi.