Jubilons ensemble
Entendons-nous
bien, je vomis Sarkozy, sa politique d 'immigration, sa politque économique,
fiscale, sociale, sociétale, sa médiatisation, sa peoplisation, ses
méthodes, sa violence, sa démagogie, son nationalisme, son agressivité. Tout en
bloc, je vomis.
Tout en bloc, sauf... sa réforme des retraites, et plus précisément, sa réforme
des régimes spéciaux.
Depuis des décennies maintenant, les gouvernements successifs cherchent à
assurer la pérennité du financement du système des retraites en France. Depuis des
décennies, les régimes spéciaux des milieux socioprofessionnels les mieux
syndiqués échappent à cet effort de financement et de rationalisation, au seul
moyen d'un bras de force social, dont, compte tenus des moyens structurels dont
ils disposent (transports, énergie), ils ressortent vainqueurs.
J'espère sincèrement que ce ne sera pas le cas cette année.
La réforme de 2003 avait épargné les régimes spéciaux. En dehors de la Fonction
Publique d’Etat, cela concernent 6,4% des pensions versées. Ces régimes sont
équilibrés grâce à des subventions ou des taxes affectées.
Aujourd'hui, les
salariés de la SNCF par exemple invoque la pénibilité de leur travail pour
préserver leurs conditions dérogatoires de départ à la retraite. Il faut
rappeler que l'âge moyen de départ à la retraite pour un employé de la SNCF est
de 55ans; il faut rappeler également que l'âge moyen au décès des employés de
la SNCF est de 80,1ans. Il est donc manifeste que l'espérance de vie des
cheminots, n'est plus, comme par le passé affectée par les conditions de leur
profession.
A titre indicatif, celle d'un ouvrier du secteur privé, qui sera
parti à la retraite entre 60 et 64ans, n'atteint pas les 70ans...
En outre, la
démographie dans la plupart de ces secteurs laisse attendre une baisse de
cotisants et une augmentation du nombre de pensionnés. Ainsi, pour les
Industries Electriques et Gazières, on compte aujourd’hui 1,14 cotisant pour 1
pensionné, et on passera à 0,81 cotisant pour 1 pensionné en 2020. Il faut donc
bien admettre que de plus en pus, ces régimes spéciaux auront besoins de
financements extérieurs pour assurer les pensions de leurs retraités.
Il
me semble aberrant qu’en 2007, après des années et des années d’alerte sur
l’état des comptes de la Sécurité Sociale, certains continuent à défendre aussi
farouchement des « acquis » d’un autre âge. Il me semble d’ailleurs tout aussi aberrant de
considérer ces conditions qui ne sont ni plus ni moins que des avantages
certains comme des « acquis » justement. Tout évolue. Leur profession
a évolué, la société a évolué, l’économie a évolué, la démographie a évolué, il
est normal, et nécessaire que les régimes spéciaux évoluent aussi.
C’est une
question d’équité sociale. Si l’on accepte que les employés de la SNCF partent
à la retraite à 55 ans, il faudrait alors le permettre aussi pour les ouvriers
du BTP, vous savez le couvreur de 57ans qui monte encore sur son toit, en plein
hiver, par –5 degrés ? Eh bien oui, du moment qu’il ne pleut pas, du
moment qu’il ne neige pas, il faut bien travailler ! Il faudrait le
permettre aussi par exemple pour les employés des péages autoroutes, vous
savez, ce qui passent leur nuit, inconfortablement assis dans leur cabine
exiguë, à attendre l’automobiliste ou le chauffeur routier nocturne ? Ce
n’est pas de la pénibilité du travail, tout cela, peut être ? Sauf que
c’est impossible que tout ce monde-là ne cotise que 37,5ans. On criera au nivellement par le bas. Alors qu'il s'agit de réalisme. Pas besoin de voter à droite pour en être convaincue. J'irais même jusqu'à dire que ce genre de débat s'affranchit de toute appartenance politique.
La durée de
cotisation reste le seul paramètre sur lequel nous disposons d’une certaine
marge de manœuvre pour assurer l’avenir des retraites en France : il est
en effet impossible de baisser le niveau des pensions (le taux de remplacement
moyen aujourd’hui n’est déjà plus qu’à 69%) , tout autant que d’augmenter le
niveau des cotisations sociales (qui sont en France parmi les plus élevées d’Europe
et l’objet de bien des contestations déjà). Alors on fait comment, si on ne
loge pas tout le monde à la même enseigne ? J’entends déjà hurler sur le
régime des parlementaires. Mon sentiment vis à vis d’eux est le même :
les pensions accumulées qui leur sont versées sont aberrantes. J’espère
follement (et illusoirement sans doute, mais c’est un autre débat) qu’on les
rationnalise aussi. Cependant, il convient de rappeler que le ratio de
population concerné par ce régime des parlementaires est tout de même
sensiblement inférieur à celui de la SNCF, de la RATP, des IEG et de l’Armée
cumulés.
Finalement,
je trouve que le véritable échec de la démocratie sociale il vient de nous
directement : qui préfèrons visiblement gaspiller notre temps et notre
énergie dans de vains combats, à défendre d’antiques privilèges, plutôt que de
nous pencher sur les vraies menaces portées par ce gouvernement : la
réduction du nombre de professeurs, la fermeture des tribunaux, cet imbécile système
des heures supplémentaires défiscalisées, la dépénalisation des délits financiers
au sein de l’entreprise, l’immigration et les tests ADN, tout ce qui vraiment,
réellement, met en péril notre équilibre; bien plus que le confort bafoué de ce
qui reste une minorité.